TECHNIQUE
Cool and Comfort 84 – février 2020
Comment limiter efficacement la corrosion des refroidisseurs
La meilleure conception d’échangeur de chaleur restera, à long terme, inefficace si les matériaux employés n’ont pas été sélectionnés en fonction du milieu ambiant. Dans le cas extrême, cela peut même conduire à ce que tout ou partie d’un appareil se corrode à brève échéance et entraîner son remplacement prématuré. Ce texte donne un aperçu du phénomène de corrosion sur les échangeurs de chaleur. Il expose les différents risques potentiels et présente des possibilités de lutte efficace contre la corrosion dans le cas des refroidisseurs.
Dr. Andreas Zürner, Recherche, Güntner GmbH & Co. KG
Le seul fait qu’aucun métal courant ne se trouve dans la nature en quantité appréciable, c’est-à-dire dans sa forme pure, montre que même les métaux résistants à la corrosion tels que le cuivre ou l’aluminium sont, à long terme, attaqués par les effets de l’environnement, c’est-à-dire par la corrosion. Pour simplifier, disons que cette forme de corrosion fait appel aux réactions chimiques « inverses » de celles mises en œuvre dans le processus de fabrication, les métaux et alliages se retransformant en minerais, justement ceux dont ils ont été extraits comme par exemple l’alumine ou le sulfure de cuivre. Bien entendu, ce processus est, en règle générale, particulièrement lent et à peine perceptible, comme on le remarque notamment sur les toitures en cuivre et les façades en aluminium. Cependant, dans le cas des refroidisseurs, la corrosion peut s’accélérer si fortement du fait des conditions d’utilisation et d’un mauvais choix de matériau qu’on peut voir apparaître des pertes de puissances ou même des fuites en très peu de temps.
À ce sujet, ouvrons une petite parenthèse et faisons un peu de chimie : Au niveau microscopique, la surface d’un métal n’est pas statique mais soumise à un processus de modification constant. Alors que les atomes situés à l’intérieur sont entourés de tous côtés d’autres atomes de métal et peuvent ainsi voir leurs électrons entièrement saturés, il manque parfois aux atomes situés en surface les partenaires qu’il leur faudrait pour cela. Ils surmontent cette difficulté en établissant des liaisons entre les molécules environnantes et la surface des solides. Il arrive alors parfois que les atomes superficiels développent de nouvelles liaisons avec ces molécules et perdent ainsi leur caractère métallique. Dans le cas de tous les métaux courants, cela conduit à l’apparition, à très brève échéance, d’une fine couche non-métallique à la surface des métaux bruts au contact de l’air ou plongés dans l’eau. À savoir s’il s’agit là des premières phases d’une attaque corrosive dépend de nombreux facteurs. En fonction du type de métal et de l’environnement, cette couche peut en effet ralentir considérablement la poursuite de la corrosion (c’est par exemple le cas de l’aluminium), mais aussi n’avoir aucune influence décelable sur la vitesse des réactions chimiques dont la surface du métal est le siège (c’est le cas d’un acier non allié, par exemple).
Définition de la corrosion selon la norme EN ISO 8044 :
« La corrosion est définie comme l’interaction physico-chimique entre un métal et son milieu environnant entraînant des modifications dans les propriétés du métal et pouvant conduire à une dégradation significative de la fonction du métal, du milieu environnant ou du système technique dont ils font partie. »
Il y a « corrosion » et « corrosion » !
En ce qui concerne les échangeurs de chaleur, parmi les 56 formes de corrosion décrites dans l’EN ISO 8044, cinq d’entre elles jouent un rôle prépondérant :
- La corrosion de surface uniforme
- La corrosion perforante (formation de piqûres)
- La corrosion perforante qui détruit seulement des petites parties de la surface
- La corrosion fissurante
- La corrosion par contact (= corrosion due à la présence de deux métaux ou corrosion galvanique) : voir Figures.
Les types de corrosion cités relèvent du même principe de base, à savoir le mécanisme de la corrosion électrochimique. Dans ce cadre, la surface d’un métal est sans cesse le siège de deux réactions partielles. D’une part, le métal cède des électrons dans la zone de l’anode. Ces électrons sont absorbés par les autres partenaires de la réaction dans la zone de la cathode. Dans la plupart des cas, le partenaire de la réaction est de l’oxygène.
O2 + 4e- + 2H2O ( 4 OH-
Dans ce processus, l’eau joue un rôle particulier car elle peut dissoudre les sels et conduire les ions, jouant ainsi le rôle d’un électrolyte.
Il y a toujours de l’eau autour d’un échangeur de chaleur, que ce soit du condensat, de la pluie ou l’humidité présente dans l’air. Plus une surface est exposée longtemps à l’humidité, plus les phénomènes de corrosion sont rapides. Il en va de même pour la température. En effet, plus la température est élevée, plus la corrosion progresse vite. Cela signifie que les refroidisseurs doivent être protégés plus efficacement contre les attaques de la corrosion dans les chambres froides à température normale et à température positive que des appareils comparables utilisés en congélation.
Le fait qu’une pièce métallique soit corrodée ou forme une couche protectrice dépend en définitive de ce qui advient des atomes métalliques qui ont libéré des électrons. Seule une partie de ces ions métalliques chargés positivement se dissout dans l’eau. Le reste réagit avec les ions chargés négativement et présents dans les électrolytes pour donner des sels métalliques et former des couches supérieures dans la zone de l’anode. Si ces couches n’ont qu’une faible adhérence et sont d’une nature plutôt poreuse, l’oxygène et l’eau peuvent continuer d’agir presque librement sur le métal et le dissoudre de plus en plus. Les zones d’une couleur typique brun rouille qui se forment sur les composants en acier non allié et qui parfois s’écaillent d’elles-mêmes, ou encore le vert-de-gris qui apparaît sous l’effet de l’acide acétique sur le cuivre et qui est en grande partie soluble dans l’eau, sont des exemples de telles couches.
En revanche, si la couche supérieure adhère solidement et a une épaisseur telle que l’électrolyte ne peut pénétrer à travers cette couche pour atteindre la surface métallique, la progression des processus de corrosion se ralentit nettement. Une forme très connue de cette couche protectrice supérieure est la patine de cuivre, formée de sels de cuivre de base qui, à l’inverse du vert-de-gris, ne sont que peu solubles dans l’eau.
Couche passive
Les « couches passives », qui se forment en très peu de temps sur l’aluminium brut et sur les aciers inoxydables contenant du chrome (appelés souvent « inox » dans le langage courant) sont très semblables à la patine de cuivre au plan fonctionnel, mais plus fines de plusieurs ordres de grandeur. Cette couche d’oxyde, parfois épaisse de seulement quelques nanomètres, constitue également une protection contre la corrosion particulièrement efficace. Il y a cependant lieu d’observer en général deux limitations. D’une part, les couches d’oxyde ne sont pas stables dans toutes les plages de pH, ce qui explique par exemple pourquoi elles ne sont généralement recommandées que pour des valeurs de pH comprises entre 4,5 et 8,5 dans le cas de l’aluminium, par exemple. D’autre part, tout comme la surface des métaux, la couche d’oxyde présente une couche limite très active, qui se modifie en permanence et cherche à incorporer tous les ions possibles qui se trouvent dans l’électrolyte. Si en particulier des chlorures arrivent à pénétrer de cette manière dans la couche d’oxyde, celle-ci également perd son étanchéité au fil du temps et le métal pur sous-jacent commence à se dissoudre. La structure ionique est alors rompue pour l’essentiel localement, à des emplacements isolés. À un stade avancé, ce phénomène se traduit par une corrosion perforante.
La concentration locale d’espèces individuelles a une très grande influence sur la vitesse du processus de corrosion. À l’intérieur des fissures, dans les angles et au-dessous d’impuretés tenaces, les concentrations de matériaux individuels peuvent différer nettement des concentrations relevées dans le reste de l’électrolyte. À ces endroits, cela peut donner naissance à une toute autre conductivité et à une valeur de pH très différente. Il apparaît alors localement un milieu corrosif, bien que la composition de l’électrolyte ne puisse pas elle-même être qualifiée de corrosive.
La corrosion par contact
Si deux métaux entrent en contact à l’intérieur d’une pièce, par exemple l’ailette en aluminium et le tube en cuivre, une anode et une cathode se forment simplement en raison des potentiels électrochimiques respectifs des deux métaux. En effet, le cuivre a par exemple un pH de 7,5 (zone neutre), un potentiel de +0,1 V alors que l’aluminium est à environ -0,7 V. Dans ce cadre, le cuivre agit en tant que cathode et l’aluminium moins précieux joue un rôle d’anode. Si la cathode (vers laquelle les électrons migrent) a par ailleurs une superficie particulièrement grande, l’anode perd préférentiellement des électrons et l’enlèvement de matière (c’est-à-dire la corrosion) dans la zone de l’anode est particulièrement élevé. Le rapport des superficies entre anode et cathode est par conséquent un facteur déterminant pour la vitesse de corrosion.
Conditions ambiantes défavorables
Comme mentionné en préambule, tout métal courant est soumis à des modifications dues à l’environnement. Leur rapidité dépend essentiellement des paramètres environnementaux, c’est-à-dire de la température, de l’humidité, de l’action des produits chimiques en présence, etc.
Le cuivre tout particulièrement, métal semi-précieux, présente des caractéristiques tellement « peu précieuses » en présence de sulfates, d’acétates, de chlorures, d’ammoniac, d’amines, d’oxydes d’azote, de solution de soude caustique, d’hypochlorites, de formiates, etc., qu’il se corrode et se dissout s’il est, de plus, en présence d’oxygène. Dans le cas des échangeurs de chaleur, il convient de faire tout particulièrement attention lorsqu’on recherche un matériau approprié pour des applications mettant en œuvre des conserves alimentaires au vinaigre ou fumées, du poisson, du fromage, des eaux usées, des processus de fermentation et des produits nettoyants agressifs.
Comme déjà mentionné plus haut, l’aluminium ne tolère ni les valeurs de pH élevées, ni les valeurs de pH faibles. Il ne supporte pas non plus la présence de grandes quantités de chlorures. En l’absence de protection particulière contre la corrosion, cela le rend généralement impropre à une utilisation dans les locaux de transformation de produits alimentaires acides (assaisonnements, fruits) et de poisson. Le climat marin influe aussi négativement sur sa durée de vie. Par ailleurs, il ne faut pas que l’aluminium entre en contact avec des produits nettoyants fortement alcalins ou fortement acides.
La résistance à la corrosion élevée de l’acier inoxydable nickel-chrome provient avant tout de la formation d’une couche passive d’oxyde de chrome qui est elle-même très résistante aux bases et aux acides concentrés. En outre, les fortes concentrations en halogénures comme les ions fluor, chlore et brome gênent la formation de cette couche passive et rendent ces aciers sensibles aux apparitions de corrosion localisées, telles que la corrosion perforante ou la corrosion fissurante. Or il est possible d’atteindre très facilement de telles concentrations, par exemple en cas d’utilisation de produits nettoyants à base de chlorures (hypochlorite, chlore actif, etc.). Par conséquent, les refroidisseurs en inox doivent être bien rincés à l’eau douce après avoir été nettoyés. En effet, dans le cas contraire, le chlorure présent dans les fissures et dans les autres parties difficiles d’accès a tendance à se concentrer localement et la concentration critique à partir de laquelle les processus de corrosion se développent est vite dépassée.
Mesures de protection contre la corrosion
Les conditions environnementales défavorables qui, pour des raisons de corrosion, excluent toute utilisation de refroidisseurs standard à tubes de cuivre, ailettes en aluminium et carrosseries en acier galvanisé, exigent des mesures de protection adaptées. On peut citer les possibilités suivantes :
- Augmentation des épaisseurs de matière ;
- Utilisation de matériaux résistants à la corrosion (AlMg ou inox) ou de combinaisons de matériaux (tube de cuivre avec ailette en cuivre) ;
- Revêtement de certains composants individuels ou de l’ensemble de l’échangeur de chaleur.
Güntner a réalisé de nombreuses batteries de tests dans ses laboratoires de recherche et de développement afin de tester la résistance des différents matériaux et des combinaisons de matériaux. De cette manière, et grâce à une expérience pratique de plusieurs dizaines d’années, les produits bénéficient d’une amélioration permanente. Il apparaît que, bien qu’un doublement des épaisseurs de matière permette d’allonger la durée de vie plus que proportionnellement, cela a également un impact évident sur le prix et sur le poids.
En cas d’utilisation d’inox à la place du cuivre pour le tube central, la résistance à la corrosion s’en trouve automatiquement améliorée et la durée de vie peut plus que tripler par rapport à un appareil standard. Cependant, cette solution s’accompagne d’une nette augmentation du prix. Aspect non négligeable, il est à ajouter qu’il faut une superficie environ 40 % supérieure pour obtenir les mêmes performances.
Coil Defender Güntner
Chez Güntner, en cas de protection contre la corrosion assurée par des revêtements, d’une part chacune des parties de carrosserie des refroidisseurs reçoit un revêtement époxy et, par ailleurs, des bandeaux d’aluminium préalablement revêtus sont utilisés pour la production d’ailettes revêtues de résine époxy. Conformément à l’EN ISO 12944, le revêtement époxy, en fonction de l’épaisseur de couche, satisfait même les exigences des catégories de protection contre la corrosion les plus élevées, à savoir C5-M longue durée et C5-I longue durée. De plus, la couche de vernis épaisse de quelques microns seulement appliquée sur les ailettes revêtues de résine époxy résiste sans problème à 500 heures d’essai de corrosion normalisé, c’est-à-dire l’essai de résistance au brouillard salin selon l’EN ISO 9227.
Le nouveau Coil Defender Güntner est également un revêtement époxy appliqué uniformément après fabrication, qui enveloppe aussi bien les tubes centraux que les ailettes et les tôles frontales d’une couche de protection moyenne de 200 µm (0,2 mm) d’épaisseur. Ce revêtement de qualité permet d’assurer à la batterie d’échangeurs de chaleur d’un refroidisseur standard en cuivre-aluminium une résistance à la corrosion jusqu’au tube central aussi bonne qu’avec du tube inox sur des appareils comparables. Grâce à la technologie de production développée par Güntner, la qualité du revêtement est garantie en tous points sur la profondeur de la batterie, même dans les espaces intermédiaires les plus resserrés. De plus, le Coil Defender Güntner est également homologué pour les environnements de production dans le domaine très sensible de l’alimentaire. En effet, le revêtement époxy est certifié par TÜV Süd en tant que « HACCP-ready » (HACCP = Hazard Analysis and Critical Control Points, Analyse des dangers et points critiques pour leur maîtrise).
Conclusion
Dans le domaine de la transformation des produits alimentaires, il y a autant d’approches possibles de lutte contre la corrosion que de facteurs favorisant le développement de la corrosion. Cela est dû, d’une part, aux différents produits alimentaires stockés ou transformés (par exemple poissons de mer, viandes, fromages, fruits, vinaigre, saumure) et, d’autre part, aux produits nettoyants employés, qui contiennent souvent des matières agressives, fortement acides ou alcalines. Par ailleurs, l’humidité et la température ambiantes ont également une influence considérable sur les processus corrosifs.
De ce fait, si le haut niveau de qualité d’un refroidisseur durable est un critère incontournable, une solution spécialement adaptée à l’exploitant n’est possible que dans le cadre d’un dialogue constructif entre les différentes parties prenantes. Les exigences applicables à un appareil donné dépendent à la fois du secteur d’activité, du cas d’utilisation concret et de l’utilisateur.
Vous pouvez trouver de plus amples informations sur ce sujet dans la brochure Güntner « Recommandations de matériaux » et dans les applications Güntner correspondantes, téléchargeables sur le site web de Güntner.